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   THÉME DU MOIS
   La Qualité environnementale

La Qualité environnementale : Une réponse de la construction aux

enjeux du développement durable urbain

 

Les enjeux

Les préoccupations environnementales concernant le bâtiment sont récentes. En effet, les études d'impact sur l'environnement, crées le 12 octobre 1977, excluaient de leur champ d'application l'évaluation environnementale des documents d'urbanisme. Seule une petite étude d'environnement était prévue dans l'élaboration des plans d'occupation des sols. Une évolution intéressante est intervenue le 23 avril 1985 puisque les opérations de construction importantes, donnant lieu à enquête publique, doivent maintenant faire l'objet d'une étude d'impact.

En l’absence d’exigences réglementaires précises, il s’agit principalement d’améliorer la qualité environnementale des bâtiments par rapport à ce qui se fait aujourd’hui, tout en prenant en compte les autres exigences (sécurité, usage, durabilité..)

 

Cette amélioration de la qualité environnementale des bâtiments pourra s’appuyer sur un certain nombre d’objectifs environnementaux qui peuvent se traduire par l’utilisation réduite des ressources naturelles, une pollution réduite de l’air, de l’eau et des sols, une production réduite des déchets ultimes et une relation satisfaisante du bâtiment avec son environnement extérieur.

 

Cependant, dans ce contexte, les impacts environnementaux occasionnés par la construction, l'utilisation, la maintenance et la démolition ou la déconstruction des bâtiments de tout type n'ont été que peu étudiés et, en tous les cas, sans aucune logique générale d'ensemble. Cette situation est préoccupante car les résultats indéniables du traitement actuel de quelques points particuliers (hygiène, économie d'énergie et acoustique,...) ne sont pas à la mesure de l'importance de l'ensemble des impacts environnementaux des bâtiments Les exemples suivants permettent de prendre conscience de l'ampleur des problèmes posés, en France, par les interactions entre les bâtiments et leur environnement.

- Prélèvements (impact concerné : épuisement des ressources naturelles) :

- chaque m2 construit nécessite l'apport de 1 à 2 t de matériaux divers ;

- la consommation nette d'eau potable par les individus s'élève à 8.109 m3.an-1 ;

- la consommation de granulats représente une masse de 7 t.an-1 , par habitant.

- Rejets (impacts concernés: pollutions de l'eau, de l'air et des sols ; effet de serre ; destruction de la couche d'ozone) :

- la démolition produit chaque année 23.106 t de gravats et déchets divers, soit à peu près autant que le tonnage des ordures ménagères ;

- le secteur tertiaire et résidentiel est responsable de 30% des émissions annuelles nationales de CO2 , soit environ 2 t/m2 habitable ;

- La quantité de CFC, stockée dans les mousses isolantes mises en place dans les bâtiments construits,  représentait, en 1989, une masse de 54.103 t.

 

Les impacts précédents correspondent à l'exploitation d'un écosystème appelé "environnement" et regroupant les éléments, les ressources naturelles et les cycles de fonctionnement du système terrestre, par un autre écosystème appelé "anthroposystème" qui comprend à la fois les hommes et les produits de leurs activités - la finalité étant l'augmentation de la diversité spécifique du système terrestre.

 

Cette exploitation devrait se faire avec un minimum d'atteintes à l'environnement pour éviter sa déstructuration et son retour vers un état juvénile. Afin de respecter les équilibres naturels, les débats sur l'environnement, dont le nombre s'est amplifié au cours de ces vingt dernières années, ont permis de définir en 1989 la notion fondamentale de " développement durable" qui est un compromis entre la croissance économique et la préservation du patrimoine naturel.

 

Ce cadre général a permis l'émergence très récente, dans le secteur du BTP, de la notion de "bâtiment durable" qui se traduit par la volonté d'intégrer la préoccupation environnementale dans la démarche qualité, désormais familière aux différents acteurs de la construction.

 

Les spécificités des interactions bâtiment/environnement et la rareté actuelle de méthodes opérationnelles pour introduire la qualité environnementale dans l'acte de construire justifient que des recherches soient entreprises dans ce domaine particulier. Des enjeux économiques, politiques et scientifiques sont en effet fortement liés aux objectifs de la qualité environnementale des bâtiments.

 

Cette nouvelle exigence de "bâtiment durable" nous a conduit à mener des recherches afin de développer des outils permettant d'apporter une solution aux difficultés liées à l'intégration de la qualité environnementale lors de la conception des bâtiments.

 

 

Pour arriver  à notre objectif qui est de concevoir des bâtiments de haute qualité environnementale (HQE). Nous avons décliné cette dernière en cibles environnementales qui permettent de mettre en correspondance les impacts environnementaux avec les moyens dont disposent les acteurs pour satisfaire les exigences environnementales

.

L'évaluation de la qualité environnementale des bâtiments est théoriquement possible en empruntant la démarche des analyses de cycle de vie ("ACV"), largement utilisée dans les autres secteurs d'activité. Si l'application des ACV aux matériaux et aux procédés de construction est prometteuse, sa généralisation à un ensemble complexe tel qu'un bâtiment entier paraît utopique, compte tenu du nombre d'objets et d'impacts à considérer. On devra donc la réserver à l'étude d'un nombre limité d'impacts pour choisir, par exemple, entre plusieurs variantes de conception qui ne concerneraient que quelques éléments bien ciblés.

 

L'intégration des objectifs de qualité environnementale dans la conception des bâtiments est cependant possible grâce à des méthodes d'aide à la décision. Elles peuvent privilégier certaines cibles environnementales correspondant aux exigences de la prescription et peuvent être adaptées aux différentes phases de conception. Nous présenterons trois méthodes qui sont soit en cours de validation, soit encore en cours de développement.

Quels que soient leur type (ACV ou autres), toutes ces méthodes contribueront certainement à générer un élan nouveau dans les techniques et dans les comportements des acteurs pour que les bâtiments futurs soient tous en harmonie avec leur environnement extérieur ( réduction des impacts de dimension planétaire, régionale ou locale) et avec leur environnement intérieur (confort et santé)

 

 Impacts environnementaux et cibles environnementales

 

. Définition de la qualité environnementale des bâtiments

 

La qualité environnementale d’un bâtiment correspond aux caractéristiques d'un bâtiment qui lui confèrent l'aptitude à satisfaire les exigences environnementales; c'est à dire :

- utilisation réduite des ressources naturelles (eau, matériaux, combustibles fossiles)

- réduction de la pollution (émissions et rejets) de l'air, de l'eau et des sols ;

- production réduite de déchets ultimes ;

- satisfaction des exigences des usagers : santé, confort global et qualité de vie ;

- intégration satisfaisante dans son environnement de proximité.

La qualité environnementale d'un bâtiment concerne les caractéristiques de son enveloppe, de ses équipements (produits et services) et de ses abords immédiats. Elle devra être appréhendée au niveau de toutes les phases de son cycle de vie :

- phase de construction, y compris fabrication des matériaux de construction ;

- phase d'utilisation et d'exploitation. Comme cette phase est très longue (entre 50 et 100 ans) par rapport aux autres, certains impacts comme ceux relatifs aux consommations énergétiques, aux consommations d'eau et à la production des déchets d'activité deviennent prédominants dans la QE;

- phase d'adaptation : amélioration, entretien, rénovation et réhabilitation ;

- phase de démolition.

Les difficultés pour réaliser les objectifs de la QE sont principalement dues aux spécificités des bâtiments qui les distinguent des autres produits manufacturés, lorsqu'on analyse leur interactions avec l'environnement :

- durée de vie très longue (de 50 à 100 ans) ;

- plusieurs phases de durée très différentes ;

- des acteurs nombreux et différents suivant les phases ;

- des données fortement lacunaires car prise de conscience très récente de la QE ;

- la prise en compte de deux aspects environnementaux : l'influence du bâtiment sur l'environnement extérieur et l'influence du bâtiment sur l'environnement intérieur.

 

Les cibles environnementales

 

Les exigences environnementales peuvent être regroupées en considérant les familles de moyens qui permettent de les satisfaire. On obtient alors les cibles environnementales du tableau 1 ci - dessous :

 

Famille de moyens

Cibles environnementales

 

Eco-construction

- Relation harmonieuse du bâti avec son environnement immédiat

- Bâtiment, procédés et produits de construction "durables"

- Chantiers à faibles nuisances (construction, rénovation et démolition) appelés "Chantiers verts"

 

Eco-gestion

- Gestion de l'énergie

- Gestion de l'eau

- Gestion des déchets d'activités

- Maintenance et entretien

 

Confort

- Confort global ( acoustique, visuel, olfactif et hygrothermique).

- Bien - être

 

Santé

- Conditions sanitaires

- Qualité de l'air

- Qualité de l'eau

 

Tableau 2 : Liste des cibles environnementales

 

 

 

La satisfaction de toutes les exigences environnementales est très ambitieuse mais certainement rarement compatible avec les aspects économiques et financiers des opérations de construction. Leur regroupement en cibles environnementales permet de limiter la QE à quelques points dont l'importance est justifiée par le contexte technique et/ou économique. Cette procédure est particulièrement intéressante pour l'établissement des prescriptions de la maîtrise d'ouvrage. En outre, les cibles environnementales peuvent être utilisées pour organiser le raisonnement et faciliter ainsi la prise en compte de la QE lors de la conception des bâtiments.

 

Impacts du bâtiment sur l'environnement extérieur et intérieur

 

Les relations entre les caractéristiques des bâtiments et les impacts sur l'environnement extérieur et intérieur nécessitent la connaissance de la chaîne : "source - facteur d'impact - effet ".Les sources sont les éléments qui sont à l'origine d'un changement environnemental (exemples : combustion de fioul, mise en décharge de déchets, climatisation)

Dans le cas des atteintes à l'environnement extérieur, les facteurs d'impact sont des flux de substances solides, liquides ou gazeuses, ou des flux d'énergie, en provenance ou en partance directe vers le système "environnement" et intervenant dans toutes les étapes des processus agissant sur le produit étudié, au cours de son cycle de vie (exemples : masse de CO2, quantité d'eau consommée, quantité de déchets...). Il s'agit donc de grandeurs extensives qui sont liées à une unité fonctionnelle, c'est à dire l'unité qui caractérise le mieux le produit étudié par sa fonction et pour une certaine durée - pour le bâtiment, on peut prendre le m2 habitable, le m2 hors oeuvre ou le logement. Pour les atteintes du bâtiment sur l'environnement intérieur, les facteurs d'impact sont préférentiellement des grandeurs intensives (exemples : concentration, température, niveau sonore,...) résultant d'une relation de causalité avec les sources correspondantes.

Les effets sont des contributions potentielles à des modifications de l'environnement  provoquées par un facteur d'impact. On confond souvent effets et impacts mais il y a une nuance importante entre les deux car les impacts supposent l'existence d'un récepteur réel bien identifié, capable de traduire l'influence ou la perception d'un facteur d'impact. Par exemple, l'effet de serre peut être évalué par le coefficient GWP (global warming potential) en fonction des différentes quantités de gaz à "effet de serre" (facteurs d'impact) mais l'impact réel, correspondant au réchauffement de la planète, ne peut pas encore être évalué, faute de connaissances suffisamment précises sur le sujet. En d'autres termes, l'état actuel des recherches en environnement nous impose de prendre en compte des mécanismes (effet de serre, acidification, ...) dont les conséquences sur l'environnement, en termes d'impacts, sont encore mal décrites.

 

Les impacts des bâtiments sur l'environnement extérieur sont classés habituellement en fonction de l'étendue de leur influence. On considère l'échelle globale ou planétaire (tableau 2), l'échelle régionale et l'échelle locale (tableau 3). Les impacts sur l'environnement intérieur sont donnés par le tableau 4. Ces listes d'impacts ont été établies par l'Atelier d'évaluation de la qualité environnementale

 

 

Impact ou Effet

Facteur d'impact

Source ou cause

 

1 - Effet de serre

 

CO2

CH4

O3 troposphérique

N2O

Chauffage, ECS, énergie de fabrication

Décomposition des déchets organiques

COV+NOx+CO+(Rayonnement solaire)

Combustibles fossiles

2 - Destruction de la couche d'ozone

HCFC, CFC

 

Climatisation, Isolation (agents gonflants)

3 - Diminution

- mat.  premières

- énergies fossiles

quantités de matières et

conso d'énergie

Construction;

Chauffage, ECS, énergie de fabrication, Usages spécifiques de l'électricité

 

Tableau 2 Impacts à l’échelle planétaire

 

 

 

Echelle d'influence

Impacts ou effets

 

 

 

 

 

Echelle régionale

1- Pluies acides

2- Pollutions de l'air (smog)

3- Pollutions par les déchets ultimes non radioactifs

4- Pollutions par les déchets radioactifs

5- Pollution de l'eau (- déchets)

6- Pollution des sols (- déchets)

7- Modification des écosystèmes (climat,, paysage, faune, flore)

8- Epuisement des ressources naturelles (eau, combustibles et matériaux régionaux non renouvelables, espaces naturels)

 

 

 

 

Echelle locale

1- Occupation des sols et dévégétalisation

2- Gènes urbaines pour les riverains

(vent, ombre, bruit, poussières, odeurs, aspect visuel)

3- Gènes pour les ouvriers de chantier et agents d'entretien

4- Pollution de l'air

5- Pollution des sols

6- Modification des nappes, des écoulements, pollution de l'eau

 

Tableau 3 : Impacts à l'échelle régionale et à l'échelle locale

 

 

Cible environnementale

Impacts sur l'usager

 

 

 

Confort

1- Inconfort hygrothermique

2- Gène acoustique

3- Inconfort visuel

4- Inconfort olfactif

5- Gène due au vent

6- Sensation d'inconfort psychosociologique

 

 

Santé

1- Maladies dues à la pollution du sol

2-    "     "     "     "    "    "       de l'eau

3-     "     "     "     "    "    "      de l'air

4- Maladies dues au bruit et aux vibrations

5- Syndrome des bâtiments malsains

 

Tableau 4 : Impacts sur l'environnement intérieur

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